J’ai accompli dans l’heure et demie suivante toutes les formalités nécessaires. Arrivé à la sortie du terminal, j’ai vu M. Scaërou pour la première fois. Comme il avait été décidé à l’avance, il avait une pancarte portant mon nom. Lors de cette première rencontre, j’ai eu l’impression que c’était un homme sympathique qui aimait bien parler aux autres d’une grande gamme de sujets portant sur ses propres expériences ainsi que sur l’actualité internationale. Sans perdre de temps, on a pris le RER et puis le métro pour arriver à son appartement, qui se situe tout près de la Basilique du Sacré-Cœur, dans le quartier de Montmartre.

Day 1 selfie

Pendant le trajet, M. Scaërou m’a renseigné sur les quartiers par lesquels on est passé. Il a parlé, de surcroît, des pays où il avait voyagé. Je m’étais émerveillé du nombre de pays où il avait séjourné, et par conséquent de sa capacité à se faire une opinion sur les habitants de toutes ces différentes régions du monde, et de la justifier a posteriori. En même temps, il n’a pas cherché à imposer son point de vue : il insistait à tout moment que ce n’était qu’une opinion, ce qui démontrait une certaine ouverture d’esprit.  Il m’a également prévenu que la semaine allait vite passer, et qu’il était impératif par conséquent de formuler un plan concret et faisable pour une visite bien réussie.

En route, j’ai également apprécié le sens de la responsabilité civique chez les Parisiens. Quand j’ai trouvé difficile de porter ma valise en montant l’escalier d’une station de métro, un jeune homme, sans que je lui aie demandé, est venu m’aider. Ce petit incident m’a beaucoup impressionné. J’ai observé en plus un respect quasi-total du code de la route, ce qui rend la circulation nettement moins anarchique qu’en Inde.

Descendant du métro à la station Anvers, on est arrivé chez M. Scaërou. Il habite un appartement dans un immeuble datant de 1880, avec une magnifique vue sur le Sacré-Cœur. C’est un appartement nécessairement petit, en raison des prix immobiliers astronomiques à Paris. Ici, son mode de vie est apparemment assez modeste : il n’a pas de voiture ou de télé. Pour son apport journalier en actualités, il dépend surtout de la radio, à laquelle il accède grâce à son portable, mais consulte en plus des articles de presse en ligne. Il est également passionné de littérature et de musique, ayant accumulé des collections immenses de CD musicaux et de livres en plusieurs langues, y compris l’italien. J’étais surpris de savoir à quel point il a fait la connaissance de la musique de l’Indosphère, classique ainsi que vulgaire, lorsqu’il était en Inde. Intrinsèquement, il est aussi linguiste, car il s’intéresse à l’étymologie et le développement historique des mots. C’était donc évident que j’étais chez quelqu’un d’intellectuel, avec un sens aigu de l’esthétique en plus.

Ensuite, j’ai donné à M. Scaërou les cadeaux que je lui avais apportés. Il était ravi de les recevoir. Il a surtout apprécié la kurta, un vêtement répandu dans le nord de l’Inde. Un peu plus tard, je l’ai rejoint dans la cuisine. Pour l’entrée il avait préparé des patates frites, du magret de canard bien cuit comme plat principal, suivi de deux fromages au goût pas trop fort, des fraises comme dessert, et du café et du chocolat pour terminer. C’était pendant ce repas que j’ai Day 1 basiliqueappris qu’il n’est pas mal vu dans le contexte français de laisser de la nourriture dans son assiette. Ce conseil m’a été utile plus tard, car ensuite, je ne me suis jamais forcé à manger ce dont je n’avais pas envie. En général, j’ai bien apprécié l’accent mis sur la gastronomie, surtout sur l’art de bien manger.

Après un repas assez élaboré et une heure de repos, nous avons établi un plan afin de pouvoir bien structurer ma semaine. M. Scaërou m’a suggéré d’aller voir non seulement quelques endroits typiquement touristiques comme la tour Eiffel et le musée du Louvre, mais aussi quelques lieux  moins touristiques, par exemple, le cimetière du père Lachaise. Le plan fait, on est ensuite allé ensemble nous promener dans le quartier de Montmartre. Nous avons d’abord pris le funiculaire, une sorte de wagon roulant sur une voie ferrée, qui nous a fait grimper jusqu’une certaine proximité de la Basilique. Puis nous avons continué notre marche vers le monument en marbre blanc, au sommet de la butte de Montmartre.  Il y avait pas mal de monde, puisque c’était un dimanche. Après les attentats terroristes récents, le contrôle des bagages était particulièrement strict. J’ai été impressionné par la splendeur austère de cet édifice. J’ai apprécié surtout sa conception au point culminant de Paris, qui renforce l’importance de la culture chrétienne même à l’époque contemporaine laïque.

 

Après avoir vu l’intérieur, ou la photographie était interdite, nous sommes allés nous promener dans le quartier, qui a façonné l’art moderne en abritant et fournissant une atmosphère favorable au développement de quelques grands artistes du siècle dernier, comme Picasso et Dali. On a jeté un coup-d’ œil aux œuvres exposées dans une galerie d’art moderne, ou le genre de peinture aux illusions optiques, avec une grande image qui se perçoit comme plusieurs petiteDay 1 sculptures copies, m’a frappé l’esprit. La sculpture imposant d’un homme qui semble émerger d’un mur demeure une image inoubliable pour moi.

 

Passant par la place du Tertre, l’endroit central de Montmartre, on est descendu vers Pigalle, ancien quartier des prostituées – il n’y en a plus, car elles se sont déplacées vers les périphéries de la ville. Il y reste quand même des vestiges de cette période, avec une multitude de « sex-shops » comme on les appelle là-bas. Les mœurs assez permissives des français concernant le sexe sont visibles ici. De plus, j’ai commencé là à  remarquer une différence perceptible entre ces deux quartiers. M. Scaërou m’a expliqué que chaque quartier parisien possède son caractère distinct, à l’opposé de certaines grandes villes américaines assez homogènes. Cela semble expliquer aussi la prédominance démographique des américains parmi les touristes : il se peut qu’ils soient attirés à Paris par la présence d’un environnement différent de et bien plus hétéroclite que celui auquel ils sont habitués.

Ainsi observant les particularités d’une petite partie de Paris, y compris les jeux de mots employés pour nommer les magasins, je suis rentré avec M. Scaërou chez lui. Après un moment de repos, on est ressorti, afin de diner cette fois-ci. On est allé dans une pizzeria –c’était lui qui m’a invité – et pour ma part, j’ai mangé un repas assez copieux. M. Scaërou mange assez rapidement d’habitude, mais il a été bien patient avec moi. On a parlé un peu de tout, mais surtout de la situation socio-politique dans les régions du monde dont il a fait la connaissance. Quand on est sorti du restaurant, il était presque 20h30, mais le soleil ne s’était pas encore couché. Les soirées et les crépuscules sont effectivement bien tardifs en Europe durant une bonne période autour du solstice d’été, ce qui permet aux gens de sortir après le diner avant la tombée de la nuit.

À la fin d’une première journée excellente, et en même temps fatigante, je me suis couché en attendant un deuxième jour formidable.

 

 

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